Mise à jour le 24 février 2020

Idleb ou le chaos humanitaire 

 

Plus de 900 000 personnes ont été forcées de fuir en masse leur habitation depuis le début de l'année, errant sur des centaines de kilomètres à travers la Syrie. C’est le plus large mouvement de populations au 21ème siècle. Près de 80% des déplacés sont des femmes et des enfants. 

Depuis des mois, les images se répètent et se ressemblent inlassablement, une route bondée de voitures et de camions transportant des dizaines de milliers de familles n’ayant nulle part où aller. Pour la plupart d’entre elles, ce n’est pas la première fois qu’elles fuient, c’est souvent la deuxième, troisième ou quatrième fois, venant d’Alep, de la Ghouta ou encore de Deraa. Elles errent sur les routes espérant que tout cela cesse un jour pour vivre tout simplement. 

Des familles meurent de froid sous les tentes, les hôpitaux sont détruits par les bombardements, les soignants sonnent l’alerte. Les personnes déplacées, dont la moitié sont des enfants, se réfugient dans des tentes boueuses près de la frontière turque et font face à des températures glaciales.

La situation est dramatique dans la région : bombardements quotidiens, épidémies, froid, manque de structures médicales et d’accès aux soins, conditions sanitaires désastreuses, mouvements massifs de population. Une aide médicale d’urgence est vitale. 

L’indignation du Pr Raphaël Pitti, responsable formation de l’UOSSM face à l’indifférence internationale 

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C'est la pire crise que la Syrie ait connue depuis neuf ans ! 

 Retour sur la situation avec nos équipes de l’UOSSM 

 

Le nord-ouest de la Syrie, le dernier refuge

Le nord-ouest de la Syrie correspond à une région de 9000 km2 qui comprend la province d’Idleb, l’ouest de la province d’Alep, le nord de la province d’Hama et l’est de Lattaquié. Elle compte près de 4  millions de personnes dont 2,5 millions sont identifiés comme ayant besoin d’une assistance humanitaire. 

Depuis le 28 avril 2019, cette région, inclut initialement dans une zone de désescalade de la violence, se retrouve sous le feu des bombardements des attaques aériennes continues. Depuis 10 mois, les combats n’ont cessé sans qu’il n’y ait de réelle trêve sur le terrain. 

Près d’un millier de civils sont morts. Entre septembre 2019 et janvier 2020, près de 200 enfants ont été tués par les bombardements. 

Les chiffres des bombardements sont terribles :

  • 190 écoles détruites 
  • 89 infrastructures médicales et de secours bombardées  entre mars 2019 et janvier 2020 dont : 
  • 37 hôpitaux
  • 30 centres de santé
  • 14 centres des casques blancs 
  • 8 points médicaux

En février, plusieurs hôpitaux ont été bombardés, à quelques heures d’intervalle et à plusieurs reprises les mettant hors-service. Les bombardements sont incessants. Ils ont des conséquences sur tous les secteurs. 

199 écoles ont été impactées. Seulement 23% des enfants déplacés peuvent avoir accès à l’école. Les écoles encore en service, peinent à apporter des conditions de scolarisation correctes. Les classes sont surchargées avec 80 élèves par classe et ne sont pas chauffées. 

Les mouvements massifs de population, les conditions sanitaires déplorables dans les camps, les températures glaciales et le manque d’abri permettent la prolifération de maladies contagieuses et chroniques comme la grippe. Il y a un véritable manque d’équipements médicaux, de médicaments et de structures de santé pour apporter des soins adéquats à ces déplacés.

 Des déplacés d'Idleb sous les oliviers

Le défi : atteindre les déplacés 

Étant prises pour cibles, les structures médicales et sanitaires ont dû pour la plupart suspendre leurs activités, laissant des villages et villes entières sans aucun accès aux soins. Pour pallier à ce manque, l’UOSSM et les ONG sur place ont mis en place des cliniques mobiles. 

En effet, les cliniques mobiles sont la solution humanitaire la plus simple et efficace pour apporter soins et secours médicaux aux déplacés dans les camps les plus reculés. Elles peuvent apporter autant des soins médicaux généralistes, que des soins dentaires ou du soutien psychologique et des consultations en santé mentale, ce qui est considéré comme une urgence vitale dans le contexte syrien au vu des traumatismes que les gens ont vécu et vivent encore. Malheureusement, ces cliniques mobiles sont en nombre insuffisant à l'heure actuelle. 

Dr Mohamad Taghli, médecin dans une clinique mobile de l’UOSSM à Idleb 

 

Un médecin en Syrie de l'UOSSM

“Tous les jours, il y a des milliers de nouveaux déplacés venus du sud d’Idleb à cause de l’escalade de la violence. Ils fuient pour atteindre des lieux plus sûrs sans bombardement. Les plus chanceux d’entre eux sont ceux qui peuvent trouver un abri. Nombreux sont ceux qui vivent sans abri, à ciel ouvert, rien ne les protégeant du froid de l’hiver, même pas une tente. Tous les jours, nous tentons d’atteindre un maximum de camps de déplacés, autant que possible. Nous pouvons ainsi leur apporter une aide médicale. Il y a des dizaines de cas chaque jour. Beaucoup de patients devraient être hospitalisés, comme ceux nécessitant une dialyse rénale ou ayant des complications cardio-vasculaires. 

Malheureusement, nous ne pouvons pas atteindre tous les déplacés, sachant que le secours médical n’est qu’un besoin parmi tant d’autres. Ils ont désespérément besoin d’une aide humanitaire globale : abri, alimentation...” 

Le froid et le manque de soins tuent aujourd’hui en Syrie : l’histoire de la petite Iman

Témoignage du Dr Housam Adnan, de notre hôpital à Afrin - 13 février 2020

“Aujourd’hui, la petite Iman est arrivée au sein de notre hôpital à Afrin. Son père l’a portée durant 2 kilomètres dans le froid. Elle souffrait de problèmes respiratoires mineurs. Il a tout essayé pour la garder au chaud la serrant fort contre lui. Il a commencé à marcher à 5h du matin faisant face à la neige et le vent, à travers les ruines de sa ville. Il n’avait que des chaussures usées. Ses mains et ses pieds étaient gelés. Il a marché durant 2 heures avant d’atteindre notre hôpital. Nous avons dû la tirer pour la prendre de ses bras. Nous avons découvert son visage d’ange, souriant. Mais elle ne bougeait plus. Elle était morte depuis au moins 1h, tuée par le froid et l’indifférence internationale. Je me sens faible et impuissant face aux larmes de ce père qui vient de perdre sa fille dans ses bras."

À la guerre et au froid, vient s'ajouter la faim 

Les mesures de restrictions financières et d’embargo qui pèsent sur la Syrie ont conduit à une baisse significative et historique de la valeur de la livre syrienne. Le risque de famine est bien réel. 54% de la population syrienne est en situation de risque ou d'insécurité alimentaire (Source : RAPPORT "FOOD SECURITY SITUATION IN SYRIA"). La malnutrition et la famine sont des conséquences directes de la guerre : 

  • Un accès limité à une eau et à une nourriture de qualité, de mauvaises habitudes alimentaires, une insuffisance en protéines et en micronutriments, rendant toute une population plus vulnérable aux maladies.

  • Forte baisse de la production alimentaire, provoquant une flambée des prix (panier alimentaire 90% supérieur aux moyennes nationales d'août 2015 et 800% plus élevé qu'avant la crise).

  • Destruction des services publics et de santé. Zones assiégées et camps de réfugiés où les quantités alimentaires sont insuffisantes.

Beaucoup d’indicateurs montrent un risque de famine imminent en Syrie notamment dans les camps de déplacés d'Idleb qui réunissent tous les facteurs d'insécurité alimentaire 

 

Notre action sur la malnutrition en Syrie : https://www.cebraceletsauvedesvies.fr/  

 

Quels sont les besoins humanitaires dans cette région ? 

Les Nations-Unies estiment à plus de 300 millions de dollars les besoins de financement pour répondre à l’urgence humanitaire en Syrie jusqu’en juillet 2020. 

Tous les secteurs sont en alerte : éducation, logement, eau, assainissement, nutrition, alimentation, froid. Le prix des produits de première nécessité ont augmenté de 70% ces 6 derniers mois. 

La réponse médicale et humanitaire de l’UOSSM dans le nord-ouest de la Syrie 

Médecin de l'UOSSM avec un patient Idleb camp

1146 personnels de santé sur place

Nos structures médicales et hôpitaux dans le gouvernorat d’Idleb et d’Alep : 

  • Notre entrepôt à Sarmada stocke le matériel médical, les médicaments et les consommables médicaux qui seront distribués à travers nos centres et structures médicales. 
  • 7 centres de santé primaire dont 4 ont été suspendus et/ou fermés dans les régions d’Idleb et d’Alep

Qurqaniya PHC Center dans le gouvernorat d’Idleb

Afrin PHC Center dans le gouvernorat d’Alep 

Kafr Oweid PHC Center dans le gouvernorat d’Idleb 

Les centres de santé suspendus ou fermés ont été pour certains remplacés par des cliniques mobiles

  • 6 cliniques mobiles médicales qui sillonnent la région d’Idleb, d’Alep et les camps de déplacés 
  • 11 cliniques mobiles spécialisées en santé mentale (6 dans la région d’Alep à Afrin et 5 dans la région d’Idleb) 
  • 2 centres de soutien psychologique et de santé mentale - Gouvernorat d’Idleb 
  • 1 clinique post-opératoire à Sarmada
  • 7 hôpitaux soutenus et/ou gérés par l'UOSSM 

L’hôpital Al-hikma 

L’hôpital Qalb Loze 

L’hôpital Kewan 

L’hôpital Al-hawash hôpital gynécologique et pédiatrique

L’hôpital Shinan maternité et pédiatrie

L’hôpital Jisr-Al-shughur 

L’hôpital Bab Al-Hawa

  • 1 centre de dialyse - Gouvernorat d’Idleb 
  • 1 centre de vaccination et antituberculeux 
  • 1 centre de protection des femmes

Arrivée de notre convoi médical en Syrie 

convoi médical Syrie UOSSM

Après un périple de plus de 3 semaines, notre convoi médical est arrivé à notre entrepôt en Syrie le 14 février 2020. Ces médicaments vont bénéficier directement aux déplacés. Les médicaments seront distribués dans nos centres de soins, l'hôpital Bab Al-Hawa, les cliniques mobiles déployées dans la région et les centres de santé primaire, où nous recevons directement les déplacés en détresse humanitaire.

Contenu du convoi humanitaire : plus de 10 tonnes de médicaments (80 mètres cube)

  • Matériel médical d'urgence : kits d'intervention d'urgence vitale, pansements, compresses, consommables médicaux, matériel pour les petites et grosses chirurgies
  • Traitement pour les maladies chroniques : diabète, hypertension, maladie cardio-vasculaire...
  • Antiparasitaire, antibiotiques

Les médicaments ont pu être collectés auprès de l'association Tulipe (Urgence et Solidarité Internationale des Entreprises de Santé) qui fédère les dons des entreprises de santé pour répondre, en urgence, aux besoins des populations en détresse, lors de crises sanitaires aiguës, de catastrophes naturelles et de conflits.

 

Notre plaidoyer : 

Nous  exhortons la France, la communauté internationale et les parties prenantes du conflit à tout mettre en oeuvre pour :

  • l'arrêt des hostilités, combats, bombardements et attaques aériennes dans le nord ouest de la Syrie 
  • le déploiement en urgence des fonds nécessaires pour apporter une aide humanitaire vitale dans la région : santé, éducation, alimentation, eau, abris.
  • la garantie d'ouverture des couloirs humanitaires jusqu'à la fin d'année 2020
  • l'acheminement immédiat de l'aide humanitaire 
  • un soutien massif des organisations humanitaires et médicales qui agissent dans le nord ouest de la Syrie 

 

L'UOSSM renouvelle son appel à la mobilisation pour soutenir nos cliniques mobiles et nos actions médicales d'urgence auprès des déplacés d'Idleb !  

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Mise à jour 15 juillet 2019 

Les images qui nous parviennent d’Idleb sont terrifiantes ! Des raids aériens et des bombardements, qui frappent sans distinction de cibles... Un scénario que les quatre millions d'habitants de la région connaissent déjà. Pour la plupart, ils viennent d'Alep, de la Ghouta ou encore de Deraa. Ils ont déjà fui l'enfer, et après avoir vécu dans des conditions déplorables, de nouveau, ils sont pris pour cible. De nouveau, ils vivent l’encerclement, la famine, le manque d’eau, la destruction systématique des structures hospitalières et des lieux de vies.

Lundi 22 juillet 2019, plusieurs bombardements aériens ont ciblé un marché bondé, à Maarat Al-Nouman dans la province d’Idleb, tuant au moins 37 personnes. La situation est terrible et ne fait qu’empirer de jour en jour. L'intégralité des personnels médicaux et des soignants est en état d'urgence, en alerte permanente dans la région nord-ouest de la Syrie. 

De Syrie à Paris et à travers le monde, les médecins de l'UOSSM se mobilisent 

#SAUVERIDLEB

Depuis le 28 avril 2019, ce sont plus de 37 hôpitaux ou structures médicales qui ont été bombardés au mépris du droit international. Avec la majorité des structures médicales fermées ou détruites à cause des bombardements, des centaines de milliers de personnes déplacées se retrouvent sans aucun accès aux soins. 637 personnes ont perdu la vie, plus de 1 497 personnes ont été blessées. Parmi ces personnes, 22 soignants ont été tués et 29 ont été blessés.

Depuis la Syrie, le Dr Tammam Lodami, lance un cri d'alarme 

Le Pr Raphaël Pitti : "La situation à Idleb est catastrophique. Nous avons vu des scènes inimaginables d'enfants tués, des images atroces, insoutenables pour une personne qui aurait une once d'humanité. Les enfants sont des êtres innocents qui ne méritent de subir cette déferlante de violence. Il faut stopper ce carnage, ce sang versé, ces attaques sur les civils, sur les structures médicales qui sont censées sauver des vies !"

 

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