4 mois après le début des offensives, un bilan sanglant à Idleb

3 septembre 2019

Le 29 avril 2019 marque le début de l’offensive sur Idleb. Depuis, les photos de corps sous les décombres, de bombardements destructeurs, les chiffres inhumains et les témoignages poignants, n’ont pas semblé faire changer les choses auprès de la communauté internationale. Lassitude ? Impuissance ? Ignorance ? La situation est extrêmement compliquée, mais ces 4 millions de civils méritent que notre attention se porte sur eux. Quatre mois après le début de l’offensive, qu’ont-ils subi ? Quels sont les dommages matériels et humains ? Quelle issue s’offre à eux ? Chronologie de quatre mois dans l’enfer d’Idleb. 

Point sur la situation – Des lignes qui bougent, des civils qui fuient. 
Zone dite de “ désescalade”, Idleb est pourtant en proie aux stratégies militaires de chaque camp impliqué dans le conflit, tout cela se faisant au détriment des civils. Conséquences ? Les zones reprises se vident et 750 000 personnes cherchent à tout prix à fuir.
La ville de Khan Cheikhoun, auparavant densément peuplée et tristement connue pour ses attaques chimiques du 4 avril 2017, s’est vidée et a été reconquise le 22 août. Les civils ont fui vers le nord d’Idleb. Beaucoup sont maintenant coincés du côté de Sarmada et al-Dana à l’est, côté frontière turque, et Kafr Hamrah et Haritan à l’ouest, côté Alep. Leur progression s’arrête aux portes de la région dite du « rameau d’olivier » (Afrin), sous-contrôle Turque. Des millions de civils sont coincés sur ces quelques kilomètres, la situation humanitaire est catastrophique ! La gestion des abris pose particulièrement problème. Vendredi 30 août, des centaines de civils ont d’ailleurs tenté de passer la frontière à Bab Al-Hawa, et ont été blessés dans des heurts.
Le sud d’Idleb, le nord-est de Lattaquié et le nord de la province d’Alep sont encore intensément bombardés. Particulièrement certaines villes, telles que Ariha, Saraqeb et Maarat al-Nouman.
Un bilan humain dramatique – Infrastructures publiques et civils sous les feux.
Survivre. C’est bien le mot qui dépeint la vie quotidienne à Idleb. Aller faire son marché le matin, étudier à l’école, se rendre chez son médecin ? C’est bien trop dangereux. Entre la fin du mois d’avril et le 31 août 2019, plus de 250 infrastructures accueillant du public ont été ciblées (dont 88 mosquées et lieux de prière, 115 écoles, 42 centres des Casques blancs). Parmi ces infrastructures, les hôpitaux et les centres de santé ne sont pas épargnés.
50 structures médicales ont été ciblées (Cf. tableau ci-joint) .
Dernières attaques en date :
– le 31 août 2019 : l’hôpital Al-Iman, l’hôpital d’obstétrique et de gynécologie de la ville d’Urem Al-Kubra, toujours dans la province d’Alep, pris pour cible par sept frappes aériennes.
– le 30 août 2019 : le centre de santé primaire d’Alzerbeh, dans la province d’Idleb, a été directement pris pour cible, par deux frappes aériennes, le mettant hors service.
Les services médicaux sont de plus en plus épars et subissent une très forte pression. Ils doivent arriver à prendre en charge les patients transférés des zones où tout a été détruit, en plus des patients atteints de maladies chroniques.
Les ambulances sont constamment freinées dans leur travail, les routes étant fréquemment bombardées. 5 ambulances ont été attaquées en plein service, 4 d’entres elles ont été mises hors service et certains membres des équipes ambulancières sont décédés.
Depuis fin avril 2019 toujours, 892 personnes sont décédées, parmi lesquelles 226 enfants et 179 femmes, ainsi que 30 travailleurs humanitaires. Le nombre de blessés s’élève à 1 912. 50% d’entre eux sont des femmes et des enfants et 40 personnes sont des travailleurs humanitaires. (Cf. tableau ci-joint)
De plus, les combats ont empêché le bon déroulement des récoltes, source principale de revenu pour les habitants. La plupart d’entre eux se retrouvent dans des conditions de vie misérables et ne peuvent pas satisfaire leurs besoins vitaux. Dans ces conditions, les maladies se propagent à grande vitesse, et sont aggravées par la promiscuité. La situation sanitaire est effroyable. Le bilan est voué à s’alourdir.
Quel avenir pour Idleb ? – La situation de ceux qui continuent de fuir la mort.
Il est très probable, et plus qu’inquiétant, que les opérations militaires se poursuivent vers le nord de la ville d’Idleb, en direction de Sarmada. Or, un million de personnes y sont regroupées. Ce qui est en jeu dans les prochains jours ? La prise des autoroutes M4 et M5. Mais une fois ces autoroutes récupérées, jusqu’où ira l’offensive ?
La poursuite des opérations militaires ciblant des infrastructures médicales accentuerait les interruptions de service, les épidémies pourront d’autant plus se propager facilement. Pire encore, imaginons l’utilisation d’armes chimiques.
Donner un avenir aux civils d’Idleb devient de plus en plus inaccessible à chaque raid aérien. Pourtant, c’est un droit fondamental. Nous nous devons d’insuffler un peu d’espoir au milieu de ces ténèbres. 
L’UOSSM plus que jamais présente !
C’est pourquoi l’UOSSM est toujours présente dans le nord-ouest syrien. Nous avons dans cette région, 4 centres de santé primaire, à Jisr Al Choughour, Ariha, Qourqania, Kafarnaha. Nous avons également un centre à Al-Bara, mais pour lequel nous avons dû suspendre nos activités. Le personnel et le matériel de ce centre ont été transférés dans deux cliniques mobiles, qui travaillent autour d’Al-Bara, où les réfugiés se sont installés. Nous avons augmenté les capacités de ces cliniques mobiles, car le nombre de réfugiés y est très important. En effet, dans les camps où elles agissent, ils étaient auparavant 2 000. Aujourd’hui, ce nombre a doublé, ils sont maintenant 4 000.
L’hôpital de Bab Al-Hawa, la plus grande structure du nord-ouest de la Syrie, ouvert par l’UOSSM en 2013, nos centres de protection à Atma et Harim, nos équipes de santé communautaire et de nutrition, ainsi que notre hôpital de santé mentale et de soutien psychologique de Sarmada, sont également toujours au cœur de l’action. Ils œuvrent jour et nuit à apporter secours et soins médicaux à la population de la région, malgré la menace.
En revanche, dans le sud d’Idleb et nord d’Hama, nous avons suspendu toutes nos activités. Les bombardements, les raids aériens et attaques permanentes ne permettaient pas de poursuivre notre travail.
Face à cette situation catastrophique, l’UOSSM lance un appel à la mobilisation pour soutenir nos actions auprès des populations d’Idleb :
– Soutien à nos cliniques mobiles qui se rendent auprès des déplacés de la guerre.
– Soutien à notre hôpital Bab Al-Hawa qui permet l’accès aux soins des populations et la prise en charge des blessés suite aux bombardements.
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