8 hôpitaux ciblés en un mois, les équipes de l’UOSSM mobilisées suite aux attaques intenses sur les hôpitaux en avril 2017

26 avril 2017

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La France confirmait ce matin, suite à la publication d’un rapport de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), l’utilisation de gaz sarin lors des attaques de Khan Sheikoun le 4 avril dernier (voir le rapport : ici). Malheureusement, cette attaque n’a été que la première d’une longue série visant les hôpitaux et les civils en Syrie, faisant du mois d’avril, un mois sanglant. 

 

Au moins 8 attaques contre des établissements médicaux ont été recensées pour le mois d’avril.

26 avril 2017 : 

Dans l’après-midi, l’hôpital Al-Latamneh, de la banlieue de Hama a été lourdement attaqué, faisant un blessé, un technicien de laboratoire enfoui sous les décombres, qui a heureusement survécu. 

A 14h, heure locale, deux travailleurs humanitaires ont été touchés par une attaque aérienne alors qu’ils étaient en visite dans une centre de santé primaire dans le district sud de Janudiyeb de la province d’Idlib. L’un d’eux qui faisait parti du personnel administratif a été tué tandis qu’un médecin a été blessé. Le même jour, un peu plus tôt, un hôpital du district sud de Deraa a été indirectement touché par un bombardement mettant l’établissement hors service, tuant une famille habitant près de l’hôpital . L’hôpital réalisait 3245 consultations , 18 accouchements, 48 chirurgies majeures par mois. 

Ce matin-là à 2h, heure locale, l’hôpital de Kafr Takhareem à Idlib a été aussi la cible de trois raids aériens. L’hôpital a été gravement endommagé et mis hors service. Deux ambulances et une voiture de service ont également été détruites. Aucun décès ou blessure n’est à signaler au sein de l’hôpital, toutefois 12 personnes ont trouvé la mort dans la zone d’attaque. L’hôpital, spécialisé en chirurgie, avait permis de soigner plus de 100 000 personnes, d’assurer, par mois, 1300 consultations, 105 chirurgies majeures et de prendre en charge 18 cas de traumatismes liés à la guerre.

Enfin, le camp de réfugié de Maaratah a été aussi attaqué causant des destructions majeures, tuant deux personnes et près de 37 blessés. 

La Coordination régionale humanitaire de l’ONU a fait une déclaration : « La communauté des Nations Unies est consternée par les dégâts et les destructions sur les établissements médicaux du Nord de la Syrie laissant des milliers de personnes sans accès aux soins médicaux. »

« Il est inacceptable que des structures médicales et des personnes qui essayent de sauver des vies soient bombardés. » déclare Kevin Kennedy, coordinateur humanitaire régional pour l’ONU sur la crise en Syrie. « Les attaques persistantes et incessantes sur les hôpitaux et les établissements médicaux sont l’une des caractéristiques les plus extrêmes de cette guerre qui ont pris la vie à des centaines de membres du personnel médical. Il faut que ça s’arrête. « 

La zone d’Idlib connait une augmentation significative des attaques sur des hôpitaux. Des milliers de personnes n’ont plus accès aux soins médicaux.

Le 22 avril, l’hôpital central d’Abdin a été attaqué, le 17 avril, l’hôpital Shnan Village, le 4 avril, l’hôpital Ikhlas. Le 7 avril et le 8 avril, c’était au tour du centre de soins primaires de Heish d’être pris pour cible. Avant cela, le 4 avril et le 12 avril, l’hôpital Rahmah à Khan Sheikhoun a été attaqué. Enfin, le 2 avril, l’hôpital national Maarat Nouman. 

Le Dr Ziad Alissa, Président de l’UOSSM France, sonne l’alarme : « En avril, pas moins de huit hôpitaux ont été attaqués, certains à plusieurs reprises. C’est inacceptable ! Des civils innocents sont pris au piège entre deux feux et ne peuvent rien faire pour se protéger ou obtenir les soins d’urgence dont ils ont besoin. Nous demandons à la communauté internationale de faire quelque chose, de mettre un terme à ces crimes contre l’humanité et de fournir une protection immédiate aux hôpitaux. »

Idlib, le prochain Alep ?

 Le Dr Ziad Alissa constate : « Il semble que la zone d’Idlib prend le même chemin funeste qu’Alep, des milliers de personnes sont maintenant abandonnées sans accès aux hôpitaux ». Au milieu de ce chaos, les équipes de l’UOSSM travaillent sans relâche pour prendre en charge les blessées de ces multiples attaques.  

22 avril 2017 :

Le dernier hôpital de la région nord de Hama et de la banlieue sud d’Idlib, l’hôpital central d’Abdin, a été attaqué deux fois et mis hors service. L’hôpital, construit en souterrain, a été frappé une première fois à 15h30, heure locale, par un « bunker buster », et une seconde fois à 17h15. Cinq personnes ont été tuées, parmi lesquelles une jeune fille, qui avait été opérée le matin même, ses parents, ainsi qu’un autre patient et son compagnon. Deux infirmières ont été blessées, l’une d’elle gravement à la colonne vertébrale.

L’hôpital, pourtant construit dans une cave à 6 mètres sous terre suite à des précédentes attaques aériennes, a été gravement endommagé : deux salles d’opération, un laboratoire, deux salles d’hospitalisation, une salle d’urgence, des appareils à rayons X et de nombreux autres équipements, ont été détruits. La Direction de la Santé de Hama a déclaré dans un communiqué : « Nous craignons que les médecins du quartier et le personnel médical fuient la région en raison des attaques systématiques des hôpitaux et des établissements médicaux. Ce qui pourrait finalement aboutir à l’effondrement complet du système de santé dans la région et donc à une catastrophe ».

 La Direction demande à la communauté internationale de soutenir la reconstruction et la réparation de ces hôpitaux : « Nous tenons la communauté internationale pour responsable et l’appelons à protéger les établissements médicaux et à les maintenir hors du conflit. Nous rappelons que ce sont des organisations civiles (ndrl comme l’UOSSM) qui fournissent des soins médicaux et portent secours aux blessés et à des civils malades (enfants, femmes et hommes) ».

17 avril :

 Le 17 avril à 13h05 heure locale, l’hôpital pour enfant et la maternité d’Idlib de Syria Relief, membre de l’UOSSM, ont été la cible de 3 attaques aériennes. Aucun décès ou blessure grave n’est à déplorer mais au moins cinq membres du personnel médical ont été blessés, dont un gynécologue et un anesthésiste qui étaient au milieu d’une opération lorsque l’hôpital a été attaqué. La mère et son enfant ont été évacués juste à temps. L’établissement a été fortement endommagé, les salles d’opération et le laboratoire ont été mis hors service.

Au même moment, des attaques avaient également lieu sur un hôpital de la banlieue de Damas, provoquant la mort d’un agent paramédical et mettant l’établissement hors service.

15 avril :

Deux jours avant, le samedi 15 avril, 15h30 heure locale, à Al-Rashidin, une explosion a touché un convoi de personnes évacuées des villes de Kefraya et Foah. 126 personnes y ont perdu la vie, dont plus de 50 enfants. 114 des 273 personnes blessées ont été transférées à l’hôpital Bab Al-Hawa, plus grand hôpital de l’UOSSM au nord de la Syrie, pour les soins d’urgence. Parmi les patients transférés on compte plus de 20 enfants et 53 femmes. 2 membres du personnel de l’UOSSM se trouvent aussi parmi les blessés.

Le personnel d’UOSSM était présent 24 heures à l’avance pour recevoir les évacués et était en mesure de fournir une aide immédiate lorsque la bombe a explosé. La rapidité exceptionnelle dont on fait preuve les équipes de l’UOSSM dans l’évacuation des 114 patients a permis de sauver de nombreuses vies qui auraient été perdues si elles n’avaient pas été là.

4 et 12 avril : attaques à Khan Sheikhoun sur l’hôpital Al-Rahma

2 avril : bombardement de l’hôpital central Maaret al-Numan dans la province d’Idlib

Faire de la protection des civils et des hôpitaux une priorité

L’UOSSM condamne fermement ces attaques répétées contre les civils et les hôpitaux et appelle toutes les parties à une résolution pacifique. Ces dernières semaines, on a pu constater une multiplication des attaques chimiques contre des civils. Elles doivent cesser et le droit international humanitaire doit être appliqué. L’ONU et les observateurs internationaux doivent jouer un rôle plus actif dans la protection des civils et la priorité à leur sécurité doit être donnée.

Le Dr Ziad Alissa, président d’UOSSM France, a déclaré : « C’est déjà assez grave que ces personnes aient été chassées de chez elles, en laissant leurs souvenirs et leur vie derrière eux, elles se retrouvent en plus face à toujours plus de souffrance et d’atrocités. Je voudrais que toutes les parties trouve une solution pour arrêter la souffrance de ces personnes afin qu’elles puissent vivre leur vie normalement, comme tout le monde ».

A propos des hôpitaux, il déclare également : « Nous avons condamné à plusieurs reprises les attaques contre les hôpitaux et les établissements médicaux. Il est intolérable qu’un hôpital qui fournit des soins spécifiques aux femmes et aux enfants ait été attaqué à trois reprises […]. Nous demandons à la communauté internationale d’exiger un arrêt immédiat du ciblage des hôpitaux et des établissements médicaux et de traduire les responsables en justice ».

Nous dénoncions dans un rapport exclusif de l’UOSSM le mois dernier la multiplication des attaques sur les hôpitaux au Nord et au Sud de la Syrie. Tous ont été atteints par des frappes aériennes au moins une fois depuis 2016 – certains jusqu’à 25 fois. Le rapport complet est disponible ici.

 Mise en place de formations pour la prise en charge des victimes des attaques

 Face à ces attaques, l’UOSSM réaffirme son engagement de fournir une aide médicale gratuite à la population syrienne. C’est dans cette optique que les équipes UOSSM France, accompagnées du Dr Ziad Alissa et du Pr Raphaël Pitti, administrateur et responsable formation UOSSM, se sont rendus en Syrie le 8 avril dernier pour acheminer 500 kilogrammes de médicaments d’urgence, destinés à la lutte contre les effets des armes chimiques, ainsi que les équipements de protection transmis par le ministre des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault.

Arrivés sur place, ils ont lancé un vaste programme de formation pour préparer le personnel soignant à l’usage de ces médicaments. Ils doivent à nouveau se rendre en Syrie dans les prochaines semaines pour continuer leur nouveau protocole de formation auprès des médecins syriens dans le Nord du pays.

 

Plus d’informations : http://www.uossm.fr/mission_humanitaire_khan_sheikhoun

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